Journée mondiale de sensibilisation à l’albinisme

Journée mondiale de sensibilisation à l’albinisme

Journée mondiale de sensibilisation à l’albinisme

Journée mondiale de sensibilisation à l’albinisme


Parler de sa propre vie, son passé, son expérience n’est pas la chose la plus facile et encore moins lorsque ce passé n’est pas des plus heureux. À l’occasion de cette journée internationale de sensibilisation à l’albinisme, je voudrais partager avec vous ce par quoi je suis passé en tant que personne albinos vivant en Afrique ( Cameroun ), les challenges, les défis mais surtout offrir un “behind the scene” du quotidien d’un jeune homme atteint d’albinisme.

 Comme la plupart des Albinos en Afrique, je viens d’une famille où l’albinisme n’existait pas avant ma naissance. Mon père ainsi que ma mère sont tous deux noirs de peau alors quand je suis né, c’était véritablement une grosse surprise pour tout le monde. Comme le vilain petit canard, j’étais différent de la masse. Ma peau blanche, mes cheveux blancs et mes yeux bleus captaient l’attention de tous ceux qui venaient faire le “voir bébé”, comme on le dit populairement.


 Heureusement, j’ai eu cette chance de naître dans une famille qui ne m’a pas renié à ma naissance. Au contraire, ils se sont informés et ont consulté des médecins dermatologues afin de savoir comment s’occuper d’un bébé albinos lorsqu’il s’agit de son alimentation, son bien-être, etc.

 Enfant, j’étais comme un joyau de la couronne britannique. Ma famille me surprotègait, je ne sortais pas comme les autres enfants, j’étais toujours couvert de la tête au pied comme un esquimau et mes jouets étaient mes plus fidèles amis. Avant l’âge de 7-8 ans, je ne me sentais pas encore tout à fait différent des autres et tellement je ne rencontrais pas d’autres enfants qu’à un moment, il y’avait personne pour me faire ressentir ma différence.

C’est au primaire que les ennuis ont débuté. En allant à l’école le matin, les enfants me dévisageaient du regard. Si les yeux pouvaient tuer, j’aurais certainement rendu l’âme à cette période là. En plus de leurs regards, s’ajoutaient des paroles à la limite cruelles à l’instar de « Njounjou », monstre etc... Vous savez à quel point les enfants peuvent être véridiques et sans filtre donc je vous laisse imaginer l’état dans lequel j’étais à chaque fois.

Pendant cette période également, les effets secondaires de l’albinisme ont commencé à se manifester, en tête de fil la vue et la sensibilité au soleil. En classe, je ne voyais presque pas le tableau à cause du problème de vue lié à ma condition. Je me rappelle même que parfois, je me levais et j’allais devant le tableau, je lisais une phrase pour ensuite aller l’écrire dans mon cahier. Selon la longueur du cours, je pouvais effectuer au minimum 10 tours du tableau à mon banc. Ça devenait assez fatiguant surtout lorsque mes camarades me faisaient remarquer leurs gènes vis-à-vis de mes déplacements incessants. En CM1, j’ai commencé à recopier les cours de mes camarades car je n’arrivais plus à suivre le rythme de tout ce qui se faisait au tableau. Cependant, cette déficience visuelle m’a permis de développer mon ouïe et d’autres sens qui jusqu’aujourd’hui m’empêchent d’être un cancre (lol)

Du primaire, je garde beaucoup de mauvais souvenirs. Tout d’abord,  je n’avais presque ou pas d’amis. Les enfants m’évitaient, ils me fuyaient et ils ne voulaient pas être dans mes 100 mètres. En bref, j’étais « persona non grata ». Ensuite, j’ai commencé à avoir la phobie de l’extérieur. L’extérieur me faisait peur, le monde m’angoissait et je préférais rester là où j’étais comblé d’amour et d’attention sans jugement. Enfin, j’ai fini par perdre le goût de l’école, ça me stressait, je ne voulais plus y aller étant donné que l’environnement était si hostile, discriminant et stigmatisant.

Au collège, les choses ont débuté à s’améliorer. J’avais des camarades qui ne me stigmatisaient pas, ils ne me regardaient pas de travers et surtout ils aimaient être à mes côtés. Au-delà d’être albinos, ils voyaient en moi un être humain comme eux, ils voyaient le garçon drôle, moqueur et surtout taquin que je suis. La stigmatisation venait plutôt du côté des enseignants et du personnel administratif car beaucoup m’empêchaient de participer à certaines activités sous le prétexte que « tu es albinos, tu ne peux pas. ». Face à eux donc, j’étais impuissant et cette situation me frustrait. C’est ainsi que le sport et le travail manuel ont été retirés de mes matières au secondaire parce que j’ai été déclaré “INAPTE”.

Un autre pan s’est ouvert au collège/lycée, les relations amoureuses. Timide comme j’étais à l’époque, je n’osais pas approcher les filles surtout lorsque j’ai commencé à écouter ce qu’elles pensaient des albinos. J’avais peur de me prendre un râteau couplé d’insultes et de propos blessants. Je me suis donc résolu à ne jamais faire le premier pas par peur de souffrir de stigmatisation.

Sur les réseaux sociaux, je recevais beaucoup de messages, de déclarations en tout genre et surtout les filles me draguaient, ce qui m’arrangeait totalement. S’il est vrai qu’il y’avait des gens qui me disaient clairement qu’ils étaient dégoûtés par les personnes Albinos, il y’en avait d’autres qui fantasmaient sur nous et pour moi, ceux-là étaient les plus importants.

Je me sentais désormais séduisant et beau et pour être sincère, mon ego était à son apogée. Non seulement à la maison on me répétait à quel point j’étais beau, mais en dehors également, j’attirais positivement les regards.

Je devenais au fil des années, un jeune homme confiant, fier et surtout narcissique, je l’avoue. Les réseaux sociaux y étaient pour beaucoup. 

En effet, ils m’ont offert une tribune pour m’exprimer, un toit pour crier et un havre qui me permettait de sortir des sombres périodes de la vie réelle. Sur Facebook, j’ai commencé à écrire sur tout ce qui me passionnait et à ma grande surprise, ça plaisait énormément aux personnes qui me lisaient. Beaucoup partageaient avec moi leur admiration car selon eux « c’était rare de voir un albinos qui s’assume et qui s’exprime librement mais surtout qui ne sent pas inférieur aux autres. »

Effectivement, je n’aime pas attirer la pitié ou encore la compassion car je ne me considère pas comme une personne faible ou handicapée. Au contraire, j’aime être au même niveau que tout le monde et démontrer mes capacités ainsi que les talents que j’ai pu amasser à travers le temps.

Parce que j’étais ouvert à tout et surtout déterminé à changer la perception des autres sur l’albinisme, je me lançais dans tout ce qui me plaisait. Je n’avais absolument aucune barrière, je touchais à tout surtout parce qu’on m’avait privé de ça plus jeune.  

Ainsi au lycée , j’ai commencé à m’exercer pendant les vacances dans l’animation radio qui me réussit plutôt bien jusqu’à ce jour. De la radio, je suis passé à la télévision lorsque je suis entré à l’université. Les retours étaient majoritairement positifs, ce qui me motivait à continuer.

 J’étais donc un albinos qui cassait les codes de la société. J’étais populaire sur les réseaux sociaux, je présentais des émissions et aussi je me faisais prendre en photo par des professionnels pour des marques. Finalement, mon albinisme était devenu un atout et un avantage et lorsque je l’ai compris, j’ai décidé d’en faire ma force et ma carte chance.

Aujourd’hui, je ne suis pas vu comme une personne faible, fragile et sensible comme les doxas et préjugés sur l’albinisme veulent le faire croire mais plutôt comme une personne talentueuse, déterminée, ouverte, travailleuse et surtout gorge.

En cette occasion spéciale donc, j’invite toutes ces personnes qui voudraient se cacher derrière leurs différences à sortir de leurs bulles. Qu’elles aillent à la conquête du monde car de leurs différences, peuvent découler des forces.

La société change, les mentalités évoluent et bientôt, les préjugés  et les doxas relèveront d’un passé sombre. Le monde vous appartient également car en réalité tout le monde est différent. Il existe de tout dans ce monde, des blancs, des noirs, des hétérosexuels, des homosexuels, des courts et des grands, entre autres.

Faites de votre différence, un atout et un facteur de réussite. La vie est belle et on en profite uniquement lorsqu’on s’ouvre aux autres et on assume fièrement notre personne.

Bonne fête.


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